Je suis né une nuit sans vent. Fils de personne, je n’avais pour moi qu’une grand-mère ancre qui me portait par le col. Une grand-mère qui ne s’exprimait qu’en parabole, le reste du temps, taiseuse. Moi, qui n’avais rien, elle m’a fabriqué un héritage de souvenirs invérifiables et de mots trop petits pour n’avoir qu’une seule définition. Un oncle, premier bachelier noir de La Réunion, un grand-père premier ingénieur marron et un arrière-grand-père artiste, enfin faussaire, qui a fini sa vie au bagne à Cayenne. Narquoise, ma grand-mère me demandait : et toi, tu feras quoi ? Un jour, je lui ai répondu que moi, je serais celui qui raconterait leurs histoires à elle et aux autres. Ma grand-mère sourit et me répondit qu’elle reconnaissait bien là ma paresse. Promesse tenue, j’écris. Ne vous étonnez donc pas de cette malfaçon dans mon langage. Je porte mes morts dans mes doigts. Ils ne sont pas toujours très dociles.
Projection "SÈT LAM" le samedi 4 novembre à 20h30 au Casino du Port
En présence du réalisateur Vincent Fontano.